Adieu Juliette Gréco !

Adieu Juliette Gréco !Adieu Juliette Gréco !
Adieu Juliette Gréco !Adieu Juliette Gréco !
Adieu Juliette Gréco !Adieu Juliette Gréco !Adieu Juliette Gréco !

Juliette Gréco, c'était d'abord une voix, grave, envoutante, fascinante. Et pourtant, le premier souvenir d'elle qui me vient immédiatement, c'est "Belphégor", le fantôme du Louvre.

Pour tous les gens nés dans les années soixante, ce feuilleton - on ne disait pas encore série - c'était un concentré de frissons, un rendez-vous culte, addictif, un suspense terriblement efficace à une époque où les effets spéciaux n'avaient pas encore été inventés. Alors peut-être qu'en revoyant "Belphégor" aujourd'hui, on trouvera la mise en scène lente et désuète mais cette économie de moyens faisait travailler notre imaginaire à plein et la voix de Juliette Gréco, le masque en cuir noir du fantôme, ses apparitions faisaient tout le sel du feuilleton. Ajoutez à ça, Paris en noir et blanc, le Louvre, les quais de Seine, le marché aux puces, les petits bistrots, l'esprit français tout simple qui nous manque tellement aujourd'hui, spécialement en période covid. Dans "Belphégor", on voit les gens traverser en dehors des clous, fumer, picoler, jurer, il n'y a pas de déchets dans les rues, c'est un Paris de rêve. Un Paris de liberté.

Liberté. Un mot qui colle bien à Juliette Gréco qui fut toute sa vie une femme indépendante, affranchie des codes et du qu'en dira-t-on. Egérie d'un Saint Germain des Prés artiste et bohème, elle choqua en étant une des premières femmes à s'habiller de vêtements d'hommes et de baskets, en chantant "Je hais les dimanches", ou en tombant amoureuse d'un Noir, le jazzman Miles Davis, à une époque où l'Amérique était toujours ségrégationniste. Elle eut de nombreux amants sans jamais avoir besoin des hommes pour exister. Si elle fut une muse pour Serge Gainsbourg ou Boris Vian, c'est souvent elle qui aida à les faire connaitre plutôt que le contraire.

Née le 7 février 1927 à Montpellier, d'un père corse commissaire de police et d'une mère bordelaise, Juliette a vécu une enfance difficile puisqu'après le divorce de ses parents, sa mère qui participait à une filière d'évasion pendant la Seconde Guerre Mondiale est arrêtée par les Allemands. L'adolescente doit fuir avec sa grande soeur Charlotte mais elles sont traquées par la Gestapo et arrêtées à leur tour. Charlotte qui était agent de liaison pour la Résistance sera torturée et Juliette, violemment frappée mais elle a réussi in extrémis à se débarrasser de papiers compromettants pour le réseau. La mère et la grande soeur de Juliette sont déportées à Ravensbrück tandis qu'elle-même est relâchée en raison de son jeune âge.

A Paris, sans ressource, elle est hébergée par sa prof de français, Hélène Duc près de l'église Saint Sulpice. Elle découvre la vie intellectuelle, prend des cours d'art dramatique,cotoie Boris Van ou Jean-Paul Sartre. Au Tabou, l'un des clubs en vogue, elle découvre une cave inutilisée dont elle va faire le rendez-vous des artistes et intellectuels existentialistes. Elle chante Prévert, Boris Vian, fait son premier Olympia en 1954. Elle sera une des amantes de Marcel Camus, de Sacha Distel ou encore du producteur de "Cléopâtre", Darryl Zanuck. Elle épouse en 1953 le comédien Philippe Lemaire dont elle aura une file, Laurence-Marie. Elle se tourne également vers le cinéma, joue chez Jean Renoir, dans "Elena et les hommes" comme chez John Houston dans "Les racines du ciel". Elle se remariera avec l'acteur Michel Piccoli, de 1966 à 1977 puis en 1988 avec Gérard Jouannest, qui fut le pianiste de Brel.

En 2015, elle entame une dernière tournée d'adieu intitulée "Merci". Mais un AVC survenu en 2016 va l'obliger à ralentir le rythme des concerts. Elle est morte deux ans après son mari et quatre ans après sa fille, disparue à 62 ans.

 

 

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